Villejuif, le 10 avril 2024

Revue Cell  
Des chercheurs internationaux posent une vision des paramètres clés à explorer pour le futur de la recherche en oncologie

24 ans après la publication des Hallmarks of cancer, devenue une référence en oncologie et qui a permis de mieux définir les facteurs moléculaires de la transformation d’une cellule normale en cancer et son évolution, une nouvelle publication répertorie cette fois les différents champs d’étude relatifs aux interactions entre l’organisme d’un patient et sa tumeur afin de comprendre la complexité de cette maladie systémique. La chercheuse Elsa Bernard, cheffe de l’équipe Oncologie computationnelle à Gustave Roussy co-dirige cet effort avec le Pr Charles Swanton du Francis Crick Institute. L’article Embracing cancer complexity : Hallmarks of systemic disease, est publié dans la revue Cell à l’occasion de son 50e anniversaire et représente la première publication princeps qui répertorie les mécanismes relationnels entre l’hôte et sa tumeur et souligne la nécessaire approche multidisciplinaire de la recherche en oncologie -  https://doi.org/10.1016/j.cell.2024.02.009  

Lors des 50 dernières années, la compréhension des différents mécanismes à l’origine de la transformation d’une cellule saine en cellule cancéreuse s’est considérablement améliorée, ce qui a permis des avancées thérapeutiques majeures en oncologie. Néanmoins, des progrès restent à faire dans l’étude des interactions entre la tumeur et l’organisme du malade dans sa globalité. Comprendre comment les cellules cancéreuses peuvent avoir une influence sur des organes qui leur sont distants, mais également élucider le rôle des paramètres environnementaux et physiologiques dans le développement de la maladie sont autant d’éléments nécessaires à une meilleure compréhension et prévention des cancers.  

La publication Embracing cancer complexity : Hallmarks of systemic disease dresse un état de l’art des différents champs d’étude s’intéressant aux relations entre un organisme humain et une tumeur. Pour ce faire, des chercheurs de plusieurs pays regroupés par Cancer Research UK ont identifié des « clouds de complexité » qui représentent des systèmes biologiques de l’hôte pouvant avoir un rôle dans l’évolution du cancer. Parmi ces chercheurs de renommée internationale, on retrouve Elsa Bernard, cheffe de groupe de l’équipe oncologie computationnelle Gustave Roussy/Inserm qui co-dirige ce travail, et le Pr Fabrice André, directeur de la recherche à Gustave Roussy. 

« Comprendre la complexité du cancer nécessite des champs d’expertise variés et le développement de programmes de recherche pluridisciplinaire pour que les chercheurs travaillent ensemble. L’objectif des différents “cloud de complexité” que nous listons servira à mieux comprendre les interactions entre le cancer et son hôte, pour mieux prendre en charge ses manifestations les plus mortelles, comme les thromboses ou la cachexie. Cette publication souhaite donner un fil rouge aux recherches futures. À terme, le cancer peut devenir une maladie chronique dont les manifestations les plus extrêmes auront disparu », explique Elsa Bernard. 

Macro et micro environnement immunitaire, inflammation, obésité, métabolisme, vieillissement, système nerveux… 

Les différents champs d’étude mentionnés dans cette perspective illustrent la multidisciplinarité de la recherche en oncologie. Le « cloud » inception and promotion rappelle que pour qu’une cellule devienne cancéreuse, un promoteur est souvent nécessaire et il peut prendre différentes formes comme la cigarette, ou une consommation excessive d’alcool. Le nuage macro- and tumor micro-environnements s’intéresse, lui, au micro-environnement tumoral – composé de cellules de soutien, du stroma, immunitaires etc. – dont on sait qu’il joue un rôle direct dans l’évolution de la maladie, mais peut également envoyer des signaux ailleurs dans l’organisme et perturber le système immunitaire dans sa globalité.

Concernant les caractéristiques propres à chaque individu, des facteurs comme le vieillissement (aging system and tissues), l’obésité et l’activité physique (obesity and physical activity), la nutrition (dietary influences), et le cycle circadien (circadian clocks), sont des facteurs à considérer pour comprendre l’évolution d’un cancer. Enfin, le microbiome influence la réponse aux traitements et la progression de la tumeur, quand le système nerveux joue un rôle dans la perception de la douleur chez les patients atteints de cancer.  

Thrombose et cachexie

L’étude pluridisciplinaire de l’ensemble de ces thématiques devrait aboutir à contrôler des expressions de la maladie comme la thrombose. Cette pathologie se caractérise par l’obstruction d’un vaisseau sanguin causée par la formation pathologique d’un caillot. Il s’agit d’une cause de mortalité chez les personnes atteintes de cancer, avec un risque neuf fois supérieur comparé à la population générale.  

L’attention est également portée sur la cachexie, soit une perte de masse corporelle importante qui découle d’un trouble du métabolisme, pouvant également être engendrée par un cancer. Les causes relatives à son apparition n’ont pas encore été entièrement établies par la communauté scientifique.  

L’approche pluridisciplinaire de la recherche en oncologie, défendue dans la publication Embracing cancer complexity : Hallmarks of systemic disease, doit permettre d’élucider les mécanismes relationnels hôte/tumeur avec pour objectif une meilleure prévention du cancer, et de ses expressions les plus néfastes.  

Source  

Cell
Embracing cancer complexity : Hallmarks of systemic disease
Article publié le 28 mars 2024
DOI : https://doi.org/10.1016/j.cell.2024.02.009

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