À l’occasion de Novembre thoracique, le mois de sensibilisation aux cancers du poumon, la Dr Pernelle Lavaud, oncologue médicale au sein du comité de pathologie thoracique de Gustave Roussy, revient sur les dernières avancées dans le traitement de cette maladie.

L’arrivée de l’immunothérapie il y a une dizaine d’années a révolutionné la prise en charge de milliers de patients atteints d’un cancer du poumon, améliorant significativement leur pronostic et permettant dans certains cas des réponses de très longue durée, même dans des maladies métastatiques. Cette approche est désormais entrée dans la pratique clinique courante, mais les chercheurs et les cliniciens continuent de développer de nouveaux traitements pour espérer guérir ou prolonger la vie d’un nombre croissant de patients.
L’injection intra-tumorale est une technique qui consiste à administrer directement au cœur de la tumeur du patient un traitement, afin de renforcer son efficacité et de limiter les effets secondaires sur les tissus sains. Jusqu’à présent, cette technique était difficile à appliquer dans le poumon, où les tumeurs sont souvent profondes et inaccessibles. Depuis l’arrivée récente à Gustave Roussy d’un nouvel appareil d’écho-endoscopie bronchique (EBUS), les médecins de l’Institut sont en mesure de réaliser des injections intra-tumorales dans des lésions intra-thoraciques, dans le cadre d’essais cliniques dans un premier temps.
Une étude de phase II va ainsi prochainement débuter chez des patients atteints d’un cancer du poumon localement avancé. Elle évaluera l’injection intra-tumorale de nanoparticules d’oxyde d’hafnium, un composé capable d’amplifier l’effet des rayonnements de la radiothérapie.
L’immunothérapie se personnalise de plus en plus. Les thérapies cellulaires permettent de mobiliser directement certaines cellules immunitaires pour qu’elles soient plus efficaces contre les tumeurs. En lien avec sa nouvelle plateforme de thérapies cellulaires baptisée ICE, Gustave Roussy va prochainement participer à l’essai clinique IOV-LUN-202. Des lymphocytes infiltrant la tumeur vont être prélevés chirurgicalement chez des patients atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules, cultivés et activés en laboratoire puis réinjectés au patient pour stimuler la réponse immunitaire.
Parallèlement, Gustave Roussy participe à des programmes innovants autour des anticorps bispécifiques, comme le tarlatamab. Ces nouveaux médicaments issus de la biotechnologie ciblent à la fois les cellules immunitaires et les cellules cancéreuses pour amplifier la réponse immunitaire anti-tumorale. Dans les cancers du poumon à petites cellules, le tarlatamab a montré des résultats importants dans de précédents essais cliniques, avec une survie médiane doublée. Grâce au programme UNLOCK, les patients peuvent accéder à ce traitement dans le cadre d’un essai clinique, en attendant qu’il soit disponible en France pour tous les patients, tout en contribuant à des travaux de recherche visant à comprendre les mécanismes de résistance et à affiner la personnalisation des thérapies.
Dans les cancers du poumon opérables, les chercheurs et les cliniciens peuvent désormais proposer l’immunothérapie dès les stades précoces et localisés de la maladie. Gustave Roussy participe à l’essai MATISSE, qui évalue une nouvelle association d’immunothérapie en situation périopératoire (avant et après la chirurgie) chez les personnes atteintes d’un cancer du poumon non à petites cellules. Cette stratégie permet déjà à certains patients d’obtenir une réponse complète avant l’intervention, c’est-à-dire une disparition totale du cancer sur les prélèvements opératoires.
Les anticorps conjugués (ADCs) et les anti-angiogéniques de nouvelle génération font également l’objet d’une intense recherche. Les premiers visent à délivrer la chimiothérapie de manière plus précise, quand les seconds ciblent les nouveaux vaisseaux sanguins créés par le cancer pour se développer.
Les anticorps bispécifiques anti-angiogéniques de nouvelle génération (ciblant PD1 et VEGF), actuellement à l’étude, associent deux mécanismes d’action complémentaires : ils stimulent le système immunitaire tout en freinant la formation de nouveaux vaisseaux sanguins qui alimentent la tumeur. Grâce à ce mécanisme d’action inédit, ces traitements peuvent désormais être proposés à un plus grand nombre de patients atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules, y compris à ceux qui étaient jusque-là exclus de ce type de thérapie en raison d’un risque de saignement. Gustave Roussy participe à l’essai international de phase III HARMONI-3, qui vise à confirmer l’efficacité et la tolérance de cette nouvelle approche avant sa mise sur le marché.
Dans les cancers du poumon à petites cellules, d’autres pistes très prometteuses émergent, comme les ADCs anti-B7H3, actuellement en essais de phase avancée et qui s’attaquent à une nouvelle cible thérapeutique.
Plusieurs vaccins thérapeutiques sont actuellement évalués dans les cancers du poumon, administrés à des patients déjà porteurs de la maladie dans le but de stimuler leur système immunitaire.
Il n’existe actuellement pas de programme de dépistage national du cancer du poumon en France à destination des grands fumeurs. L’Institut national du cancer a lancé en janvier 2025 le programme pilote IMPULSION, afin de démontrer l’intérêt ou non d’un tel dispositif dans l’Hexagone.
IMPULSION prévoit d’inclure 20 000 volontaires à risque élevé de cancer du poumon (fumeurs ou ex-fumeurs âgés de 50 à 74 ans) pour un dépistage par scanner thoracique à faible dose, associé à une démarche de sevrage tabagique. Déployé à partir de fin 2025, Gustave Roussy fera partie des centres investigateurs, via son programme INTERCEPTION poumon, déjà en place depuis 2021. Gustave Roussy sera également impliqué, par le biais d’Unicancer, dans la mise en place d’une biobanque associée au projet, qui servira par la suite à évaluer des biomarqueurs de prédiction de risque et de détection précoce du cancer du poumon.